LE PROCÈS DE RIOM : LA CONCLUSION DE LÉON BLUM (1942) Le 15 mars 1942, colère d’Hitler contre ce procès : Otto Abetz fait pression sur le maréchal Pétain et le procès est interrompu le 14 avril... De fait Léon Blum sera condamné par un décret de l’amiral Darlan à la détention à vie... La plaidoirie de Léon Blum lui vaudra durablement la sympathie et l’appui de l’opinion américaine. Le 7 décembre 1942 le New York Times titrera “ Pour Léon Blum ”. Les syndicats organiseront un meeting de solidarité à New York et Léon Blum recevra pour son anniversaire en 1942 un télégramme de félicitations signé notamment par l’épouse du Président Roosevelt. En 1943, il est déporté à Buchenwald puis à Dachau.
Messieurs, j’ai achevé. Vous pourrez naturellement nous condamner. Je crois que, même par votre arrêt, vous ne pourrez pas effacer notre œuvre. Je crois que vous ne pourrez pas effacer notre œuvre. Je crois que vous ne pourrez pas - le mot vous paraîtra peut être orgueilleux - nous chasser de l’histoire de ce pays. Nous n’y mettons pas de présomption, mais nous y apportons une certaine fierté : nous avons dans un temps bien périlleux, personnifié et vivifié la tradition authentique de notre pays, qui est la tradition démocratique et républicaine. De cette tradition, à travers l’histoire, nous aurons malgré tout été un moment. Nous ne sommes pas je ne sais quelle excroissance monstrueuse dans l’histoire de ce pays, parce que nous avons été un gouvernement populaire ; nous sommes dans la tradition de ce pays depuis la Révolution Française. Nous n’avons pas interrompu la chaîne, nous ne l’avons pas brisée, nous l’avons renouée et nous l’avons resserrée. Naturellement, il est facile quand on dispose de tous les moyens qui agissent sur l’opinion de défigurer notre œuvre, comme on peut défigurer notre personne ; notre visage. Mais la réalité est là et elle se fera jour. La durée de l’effort humain ne commande pas le rendement d’un appareil industriel , le loisir n’est la paresse ; la liberté et la justice n’ont pas fait de la patrie une proie désarmée ; avec les ilotes on ne fait pas plus des ouvriers que des soldats. Qu’il s’agisse de manier l’outil ou de manier l’arme, ce sont la liberté et la justice qui engendrent les grandes vertus viriles, la confiance, l’enthousiasme et le courage. Quand on nous dit : « Vous avez eu tort, il fallait agir autrement » on nous dit nécessairement, forcément, « il fallait briser et trahir la volonté exprimée par le peuple » . Nous ne l’avons ni trahie, ni brisée par la force, nous y avons été fidèles. Et Messieurs, par une ironie bien cruelle, c’est cette fidélité qui est devenue une trahison. Pourtant cette fidélité n’est pas épuisée, elle dure encore et la France en recueillera le bienfait dans l’avenir nous plaçons notre espérance et que ce procès, ce procès dirigé contre la République, contribuera à préparer. "