Jean-Pierre CHEVENEMENT
« Naguère enfant terrible du socialisme français, Jean-Pierre Chevènement s'est peu à peu coulé avec aisance dans les habits de l'homme d'État, au point d'être parfois surnommé le « Debré de gauche ». Né le 9 mars 1939, énarque, il commence sa carrière comme attaché commercial au ministère de l'Économie et des Finances avant de devenir conseiller commercial à Djakarta.
Il adhère en 1964 à la S.F.I.O., crée l'année suivante le Centre d'études, de recherche et d'éducation socialistes (C.E.R.E.S.) et s'allie à François Mitterrand au congrès d'Épinay en 1971, ce qui permet à ce dernier de conquérir le Parti socialiste. Membre du bureau exécutif du P.S. jusqu'en 1981 (puis de 1986 à 1993), il sera l'auteur de plusieurs projets socialistes, notamment celui qui préfigure les « 110 Propositions » du candidat Mitterrand en 1981.
Député du Territoire de Belfort depuis 1973, maire de Belfort de 1983 à 1997, puis de nouveau depuis 2001, président du conseil régional de Franche-Comté en 1981-1982, il devient en mai 1981 ministre de la Recherche, puis de l'Industrie (en 1982). En désaccord avec le « tournant de la rigueur » opéré en 1983, il quitte le gouvernement, avant d'y revenir un an plus tard comme ministre de l'Éducation (1984-1986).
Nommé ministre de la Défense en 1988, il démissionne avec fracas en janvier 1991 pour protester contre l'engagement militaire français dans la guerre du Golfe. Il prend aussi ses distances avec le P.S. à propos de la question européenne, vote non au référendum sur le traité de Maastricht et crée en 1993 son propre parti, le Mouvement des citoyens.
Avec le retour de la gauche au pouvoir en 1997, ce fervent républicain devient ministre de l'Intérieur, seul membre du gouvernement Jospin à avoir appartenu aux premières équipes ministérielles de la présidence Mitterrand. Son nom est attaché à la loi sur l'immigration, votée en avril 1998, qui modifie les lois Pasqua-Debré.
Victime d'un accident opératoire grave le 2 septembre 1998, il est provisoirement remplacé au ministère de l'Intérieur par Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'État aux D.O.M.-T.O.M., avant de reprendre ses fonctions, le 4 janvier 1999. Il doit alors affronter sa collègue Élisabeth Guigou, garde des Sceaux, à propos du traitement à appliquer aux mineurs délinquants (qu'il qualifie de « sauvageons »), puis les tourmentes du problème corse : incendie de la paillote Chez Francis, démission du préfet Bonnet, fuite de l'assassin du préfet Érignac, commissions d'enquête parlementaires. Le dialogue entre le gouvernement et les élus corses qui s'est ouvert en décembre 1999 pour tenter de définir un nouveau statut de l'île aboutit à la démission de Jean-Pierre Chevènement, en août 2000, pour la troisième fois : la possibilité d'une éventuelle dévolution du pouvoir législatif à l'Assemblée de Corse, évoquée au cours des négociations, étant incompatible avec sa conception de la République. Il retrouve en octobre 2000 son siège de député du Territoire de Belfort, et lance, en vue de l'élection présidentielle, un Pôle républicain, réunissant des personnalités politiques de tous horizons. Présenté au début de la campagne électorale comme « le troisième homme », il [obtient] 5,33 % des suffrages à l'issue du premier tour, le 21 avril 2002,